Le goût des pépins de pomme, Katharina Hagena

7 04 2013

Le goût des pépins de pomme

Présentation de l’éditeur

À la mort de Bertha, ses trois filles, Inga, Harriet et Christa, et sa petite-fille, Iris, la narratrice, se retrouvent dans leur maison de famille, à Bootshaven, dans le nord de l’Allemagne, pour la lecture du testament. A sa grande surprise, Iris hérite de la maison et doit décider en quelques jours de ce qu’elle va en faire. Bibliothécaire à Fribourg, elle n’envisage pas, dans un premier temps, de la conserver. Mais, à mesure qu’elle redécouvre chaque pièce, chaque parcelle du merveilleux jardin qui l’entoure, ses souvenirs se réveillent, reconstituant l’histoire émouvante, parfois rocambolesque, mais essentiellement tragique, de trois générations de femmes.
Katharina Hagena nous livre ici un grand roman sur le thème du souvenir et de l’oubli.

L’auteur

Katharina Hagena

Katharina Hagena est née en 1967. Spécialiste de l’œuvre de Joyce, elle a enseigné la littérature anglaise et allemande au Trinity College, à Dublin, et à l’université de Hambourg, où elle vit toujours. (source : Le livre de Poche).

Le livre

Éditions Le livre de poche – Paru le 27/04/11

Format poche – 286 pages

Une couverture toute simple avec des pommes ainsi que les feuilles du pommier, à la manière d’un livre botanique avec la coupe transversale d’une pomme. Comme pour nous signifier que l’on va découvrir l’intérieur de la vie de ces 3 générations de femmes.

Mon avis

J’ai acheté ce livre il y a un moment déjà. Le titre m’avait plu et la quatrième de couverture nous annonçant une saga familiale sur 3 générations de femmes m’ont conquis. Malheureusement, il est tombé un peu dans l’oubli et finalement, je ne l’ai ressorti de ma PAL que le mois dernier.

Je dois dire qu’au tout début je n’ai pas accroché. L’écriture de l’auteure était lourde pour moi : beaucoup de longues phrases, de longues descriptions que j’avais du mal à digérer. De plus j’ai trouvé que l’histoire en elle-même prenait du temps à démarrer, à savoir la saga sur la famille.

Mais finalement, plus j’avançais dans le livre et plus j’avais du mal à le lâcher et plus j’ai été conquise par la plume de l’auteure ! J’ai bien fait de persévérer ! Comme on dit si bien, il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis!

Nous suivons donc Iris, la narratrice de l’histoire, entre sa vie de maintenant dans la maison familiale qu’elle vient d’hériter (et dont elle hésite de garder) et ses souvenirs (dans lesquels se trouvent cette fameuse saga familiale).

Le récit s’enchaine entre la vie présente et passée sans transitions (ce qui parfois est assez difficile à suivre). En effet, les souvenirs nous sont contés au fur et à mesure qu’ils arrivent à la mémoire d’Iris : par brides, à la vue d’une simple pièce, d’une simple odeur… Tout nous est détaillé, et j’avais l’impression d’être moi-même Iris en train de revivre tous ses souvenirs. Les descriptions visuelles et olfactives sont très présentes, et j’arrivais à sentir l’odeur de ces fameuses pommes (très présentes dans le livre).

Au fur et à mesure des souvenirs qui nous parviennent, sans ordre chronologique, nous faisons la connaissance de chacune des fameuses femmes de cette famille : Bertha, ses 3 filles Harriet, Inga et Christa ainsi que de leurs propres filles Rosemarie et Iris. Je ne dirai rien sur leurs vies et leurs personnalités, mais sachez qu’elles valent toutes le détour d’être découvertes, sous un fond de tragédie familiale.

Un très bon livre sur le souvenir ainsi que sur l’oubli. J’ai finalement adhéré à l’écriture, une belle écriture (certes parfois assez longue) mais qui nous fait beaucoup réfléchir sur la place du souvenir dans nos vies.

En conclusion, ma note

4,5Un joli livre sur le souvenir, des héroïnes attachantes et une écriture particulière qu’on apprend à aimer au fur et à mesure de la lecture.

Quelques citations

p22 : “J’écrivais encore des lettres à l’époque, je croyais encore à ce qui est écrit, à ce qui est imprimé, à ce qui peut être lu. Cela ne devait pas durer. Entre-temps, j’étais devenue bibliothécaire à l’université de Fribourg, je travaillais avec les livres, j’achetais des livres, il m’arrivait même d’en emprunter. Mais lire? Non. Autrefois, oui, et même plus qu’il n’eût fallu, je lisais tout le temps, au lit, en mangeant, à bicyclette aussi. Fini, terminé. Lire signifie collectionner, et collectionner signifie conserver, et conserver signifie se souvenir, et se souvenir signifie ne pas savoir exactement, et ne pas savoir exactement signifie avoir oublié, et oublier signifie tomber, et tomber doit être rayé du programme. Cela en guise d’explication.”

p88 : “Lorsqu’on perd la mémoire, le temps passa d’abord beaucoup trop vite, ensuite plus du tout. […] Le cerveau s’ensablait comme le lit instable d’une rivière. Cela commençait par s’effriter sur les bords, puis les berges croulaient dans l’eau par pans entiers. La rivière perdait sa forme et son courant, sa raison d’être. Pour finir, cela s’arrêtait de couler, ne faisait plus que clapoter misérablement dans tous les sens. Il se formait dans le cerveau des dépôts blancs qui bloquaient les impulsions électriques, les terminaisons étaient totalement isolées, et à terme échu, la personne également.”

p108 : “Monsieur Lexow avait-il déjà oublié la soirée d’hier? Les gens devenaient-ils oublieux lorsqu’ils avaient quelque chose à oublier? L’oubli ne tenait-il qu’à l’incapacité de retenir les choses? Peut-être que les vieilles gens n’oubliaient rien mais se refusaient simplement à retenir ceci ou cela. A partir d’une certaine quantité de souvenirs, chacun devait finir par en être saturé. L’oubli n’était donc lui-même qu’une forme de souvenir. Si l’on n’oubliait rien, on ne pourrait pas non plus se souvenir de quoi que ce soit. Les souvenirs sont des îles qui flottent dans l’océan de l’oubli. Il y a dans cet océan des courants, des remous, des profondeurs insondables. Il en émerge parfois des bancs de sables qui s’agrègent autour des îles, parfois quelque chose disparaît. Le cerveau a ses marrées. Chez Bertha, les îles avaient été submergées par un raz-de-marée. Sa vie gisait-elle au fond de l’océan?”

p221 : “Quiconque oublie le temps cesse de vieillir. L’oubli triomphe du temps, ennemi de la mémoire. Car le temps, en définitive, ne guérit toutes les blessures qu’en s’alliant à l’oubli.”

 Petits plus

Livre lu dans le cadre: 81568792_p.jpg catégorie Aliment / Boisson


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3 responses

8 04 2013
stephanieplaisirdelire

C’est un titre qui m’a souvent interpelée. Ton avis est très tentant.

9 04 2013
nodreytiti

Merci. C’est vraiment un très beau livre.

15 04 2013
Véro

Comme toi, ce roman m’avait séduite au fur et à mesure de sa lecture et non d’emblée.

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